De quoi faire un pays


Mon pays est synonyme de mers, de montagnes et de vallées. Ses villages réunissent les maisons les plus charmantes aux volets colorés, ses villes ne cessent d’embrasser la diversité : une mosaïque d’époques, de gens, de rêves. Mon pays abrite ambition, motivation et désir, il est un foyer pour les gens remplis d’avidité et aux jeunes persévérants qui osent rêver. Il est parsemé d’artistes qui essayent de le représenter, chacun à sa façon, chacun à sa manière et à travers sa propre culture. Que ce soit le fameux Ziad El Rahbani avec sa mélodie inlassable, toujours remplie de messages reflétant la vie dans ce pays, ou le génie du théâtre Georges Khabbaz avec ses morales émouvantes, et bien d’autres… Chacun traduit l’image du Liban au fond de lui, le Liban qu’on espère retrouver de nouveau aujourd’hui.


Mon pays est sculpté de sourires forcés malgré tous les soucis injustement imposés. Il est décoré d’yeux remplis d’espoir pour un meilleur lendemain, mais aussi de haine envers les temps durs auxquels nous sommes condamnés. Dans ses rues se baladent les odeurs des bons plats cuisinés avec amour, essayant à tout prix de couvrir celles des ordures noyant ses trottoirs. Mon pays est fait de nuits sombres qui durent parfois plus longtemps que ses jours. Son âme est constituée de la magie des concerts qui se portaient sur les toits de Beyrouth. Ses ruelles cachent les secrets de gens qui s’aimaient, les histoires des amants aux cœurs brisés.


Mon pays reflète mon identité, mon enfance, il abrite ma vie. Il est la maison d’un peuple qui ne cesse d’essayer, de survivre et d’oublier… Oublier combien la vie est devenue dure à ses côtés. Peut-être que le Liban essaye lui-même d’oublier combien il lui manque de choses pour en faire un pays. Tous ses côtés charmants ne sont peut-être pas suffisants pour atténuer les misères de la vie quotidienne et les problèmes qui ne cessent de s’agrandir et s’aggraver. Il faut beaucoup plus que des frontières tracées et un drapeau fièrement soulevé pour faire un pays.


Mon pays est gouverné avec égoïsme, indifférence et cruauté. Il est corrompu, et meurt un peu plus de jour en jour. Le Liban n’est plus que ce qui reste de lui, ce qui reste de nous. C’est si dur de ne pas baisser les bras, mais pour tous les week-ends passés en famille dans un village lointain à la découverte de notre patrimoine, pour les road trips entre amis sur les longues autoroutes avec la lueur du soleil nous rappelant la beauté d'être jeune, pour les moments heureux vécus avec nos proches à nos côtés, pour toi mon pays, je croirai en des jours meilleurs. Pour toi mon Liban, je ne me lasserai pas d’écrire.